Dans ce livre ont été réunies des études relatives à la vie des
chrétiens à Jérusalem, une vie marquée par la liturgie, comprise et
décrite sous l'aspect du temps. A première vue, l'ouvrage tient du
guide historique, avec ses récits des premiers pèlerins à
Jérusalem, sa description des offices monastiques propres à la
ville et à la région, le rappel des sources juives des fêtes
chrétiennes. Mais il s'approche aussi de l'essai philosophique sur
l'éternité divine, touchée dans le rite quotidien de la prière. On
pense aux réflexions de J.-Y. Lacoste dans Expérience et absolu. On
sera cependant déçu si on veut y trouver une pensée achevée sur la
question. À Jérusalem, lieu de la «contradiction du temps» selon
l'expression de Dom Grammont rappelée par l'A., l'éternité et le
temps se rencontrent sous le mode de la tension, de la dialectique:
marqué par la contradiction, les déchirures politiques,
sociologiques, religieuses, c'est le seul endroit où l'éternité a
rejoint en sa totalité unitaire l'histoire humaine en sa réalité
parcellaire, en Jésus-Christ. La belle introduction sur ce thème
laisse entrevoir la préoccupation de l'auteur, qui vit à Jérusalem
depuis trente ans et y a enseigné la philosophie à l'Université
Hébraïque. On retrouve ce questionnement au fil des pages,
apparemment neutres dans leurs descriptions objectives des
célébrations chrétiennes. L'A. se garde cependant de nous offrir
une réponse définitive: Jérusalem est présentée ici comme un lieu
sacramentaire, certes. Mais dans cette densité de mémoire du salut,
actualisée en permanence, expérimentée par le pèlerin qui retrouve
les mystères de la vie du Seigneur en parcourant les rues de
Jérusalem, «la ville placée sur la montagne» reste signe de
contradiction, tout autant que pôle d'unité. - A. Massie sj