La chair du poème. Petite initiation à la vie poétique
C. Nys-MazureArts and letters - reviewer : Etienne Rousseau
Dans le poème, le narrateur se fait parfois Candide (31), qui raconte et évoque, laissant au lecteur le soin d'enfouir les paroles dans une terre que remue l'émotion. Poésie qui éclate en chants de liberté, souvent au coeur de l'in-humain. Poètes qui élèvent de tout temps la voix au nom de tous (37), mais au départ d'une expérience unique, par là ouverte à l'universel car profondément incarnée. Sont célébrées ici la beauté d'une minute de silence (42), la hauteur d'âme du psaume et du poème (51), avec un profond respect pour des vies tissées l'une à l'autre et à qui échappent parfois des larmes de sang. Oui: «parler désarme»!, et même la «prière désarme».
Une deuxième partie, «Hommage au quotidien», fait droit à cette dimension de la vie que l'A. «célébrait» si justement en 1997 (DDB). Respect attentionné envers ceux et celles dont «le coeur et l'âme sont au désert» (85). Évocation par ailleurs sans cesse émergente de «Celui qu'on ne peut nommer!». L'A. nous emmène dans le territoire fertile du poème (117), où elle rejoint, par Villon interposé, ses frères humains (126).La partie qui met un terme à l'ouvrage a pour titre celui du livre lui-même, La chair du poème. La poésie n'est pas, comme d'aucuns voudraient l'y réduire, un art futile. Elle est expression d'une vie (cf. sous-titre), profession de foi même: «La poésie, c'est toute ma vie… J'aimerais la rendre contagieuse» (176). Nous confiant combien elle aime les mots (185), Colette Nys-Mazure nous initie finement ici à considérer nos existences comme des vies non seulement « pratiques », mais « poétiques », à créer, laisser se créer. Merci, Madame! - Ét. Rousseau.