Le christianisme en procès. Lumière sur 2000 ans d'histoire et de controverses

Lütz M.
History - reviewer : Bernard Joassart s.j.

Les reproches que d’aucuns adressent au christianisme en général et à l’Église catholique en particulier sont légion : l’inquisition, le racisme, l’antisémitisme, la chasse aux sorcières, et j’en passe. Les critiques fusent… Encore faut-il qu’elles soient ad rem, que l’on ait une connaissance exacte des réalités visées et surtout qu’elles soient comprises dans leur contexte, ce qui n’est pas chose aisée. Faute de quoi, on serait en droit de désespérer du christianisme et de tomber soit dans l’accusation à tout va du côté des critiques, soit dans l’autoflagellation sans fin dans le chef des chrétiens. En 2007, l’historien allemand Arnold Angenendt publia Toleranz und Gewalt. Das Christentum zwischen Bibel und Schwert que M. L., membre du dicastère pour les laïcs, résuma, si l’on peut dire, en allemand sous le titre Der Skandal der Skandale. Die geheime Geschichte des Christentums (Freiburg/Br., 2018), d’ailleurs avec la collaboration d’Arnold Angenendt, et dont voici la traduction française. Il remet les défaillances de l’Église dans une plus juste perspective, indiquant que, notamment en matière de répression, le pouvoir civil prit dans bien des cas des mesures nettement plus draconiennes, voire cruelles à l’égard de délinquants, que ne le faisait l’Église.

Sans entrer dans le détail de tous les sujets abordés, un tel ouvrage ne remplace évidemment pas « le » livre que l’on pourrait précisément consacrer à chacun des sujets controversés. La difficulté majeure est toutefois, surtout en cas de résumé, de ne pas tomber dans le simplisme et de trouver les bonnes formules qui condensent correctement les mises au point, et ne pas risquer la moindre erreur. Je ne donnerai qu’un exemple où précisément l’A. aurait dû être plus avisé. Il écrit que dans Mit brennender Sorge, Pie xi « s’en prenait très vigoureusement à l’antisémitisme des nazis » (p. 232). C’est aller un peu vite en besogne ! Certes, l’encyclique contient des passages qui rappellent que toute forme de racisme est inacceptable et que l’AT fait partie intrinsèquement de la Révélation (et encore faut-il être conscient que si Pie xi parle bien du « peuple choisi, porteur de la Révélation et de la Promesse », la suite de la phrase dit qu’il alla « s’égarant sans cesse loin de son Dieu pour se tourner vers le monde »). Mais il n’y a pas de référence explicite à l’antisémitisme et à la persécution des Juifs. Et quelques lignes plus loin, l’A. écrit : « À la fin de son pontificat, [Pie xi] fit même rédiger une encyclique contre le racisme, mais Pie xii, qui lui succéda juste avant le début de la guerre, ne la publia pas » (p. 233). Pour le coup, l’encyclique – que d’aucuns ont jugé qu’elle avait été « cachée » – aurait eu pour but de dénoncer l’antisémitisme comme tel ; elle ne fut pas d’ailleurs « cachée » mais « inachevée », Pie xii n’ayant pas demandé qu’elle soit définitivement mise au point. — B. Joassart s.j.

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