L'A., professeur à l'université d'Avignon, étudie l'histoire, en France, à partir de 1850, de l'intérêt renouvelé pour le purgatoire, un dogme (Florence 1439, Trente 1563) aux assises scripturaires fragiles. Enracinée dans le culte familial du souvenir (tandis que faiblit la croyance à l'enfer), la dévotion aux «âmes délaissées», italianisante, est présentée comme un contrepoison au spiritisme d'Allan Kardec. Elle est propagée par les prédicateurs (Lacordaire, Ravignan, Monsabré…) avant d'être revisitée par les théologiens: la peine du dam, thomiste, finira par devenir, chez le cardinal Billot, dilatio gloriae. La doctrine présente un double aspect: la mystique réparatrice et substitutive à la Sainte Gertrude; l'aimable noviciat à la Sainte Catherine de Gênes. Parallèlement se répand la croyance, non thomiste, à l'intercession des âmes du purgatoire en faveur des vivants. Qu'en pensent les saints? À la certitude exprimée par J.-M. Vianney: Tout le monde y va… répond l'affirmation de Thérèse de Lisieux: Quand on aime, il ne peut y avoir de purgatoire.
L'A. passe en revue les différents aspects de la pratique: fondations de messes des morts, trentains grégoriens, autels privilégiés, indulgences applicables aux âmes du purgatoire, les opuscules Mois du purgatoire, le «voeu héroïque», encouragé par le Père Faber et présenté comme quatrième voeu aux Auxiliaires des âmes du purgatoire, institut fondé par Eugénie Smet. Il s'attarde aux confréries et aux sanctuaires: le Suffrage de Nîmes, l'oeuvre expiatoire de La Chapelle-Montligeon (Orne)… Il oppose les apparitions des âmes du purgatoire tant à celles des 'revenants' de la culture populaire qu'à celles des 'esprits' du spiritisme. Les héros de la Grande Guerre, passés du champ de bataille au ciel, sonnent le glas de la dévotion. Une mine de renseignements, présentés en un style alerte et respectueux, émaillé d'expressions délicieusement iconoclastes: consommation indulgenciaire, couverture expiatoire généralisée. - P. Detienne sj

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