Le triangle dramatique de Karpman (TDK), mis en évidence dans les années 1960 par S. B. Karpman, manifeste le jeu psychologique qui se déroule entre trois personnages : le Persécuteur (ou le Bourreau), la Victime et le Sauveur. Un certain nombre d’ouvrages en français sur le TDK existent déjà. Pourquoi alors un nouveau livre sur le sujet ? À visée pratique et développé en sciences humaines, le TDK pose des questions théoriques que l’A. veut affronter : il fait ainsi appel à la philosophie pour enrichir l’approche seulement descriptive et pratique de la psychologie. Il complète l’approche systémique du TDK par une approche personnelle ou psycho-éthique qui cherche à comprendre les processus intérieurs.

L’A. qualifie le schéma de Karpman de « triangle maléfique » (TM), car les relations mises en place sont toxiques : elles font du mal. « Même si la Victime a piégé son Sauveur et reçu sa dose d’aide, même si le Bourreau a coincé sa victime et reçu sa dose de domination, même si le Sauveur a ligoté sa Victime et reçu sa dose de reconnaissance, lourd est le tribut psychologique et affectif » (p. 30). Pour plus de clarté, l’A. préfère d’ailleurs appeler les personnages « Bourreau », « Victimaire » et « Sauveteur », soulignant ainsi leur rôle négatif.

Mais pourquoi le TM est-il si efficace et si universel et pourquoi tourne-t-il par une permutation entre les personnages ? L’A. estime que le TM donne à voir une dynamique du don amputée : il nous détourne du cycle du don qui est « très probablement la dynamique la plus fondamentale animant les relations humaines » (p. 62). C’est, d’ailleurs, « parce que le don est en permanente circulation que le TM tourne autant » (ibid.).

L’A. propose un ouvrage, très intéressant et à visée pratique, qui va au fond des choses. Il permet notamment d’identifier avec beaucoup de précision les personnages du TM pour mieux aider à en sortir. Il présente aussi des moyens psychologiques, éthiques et spirituels. Ce livre solide, illustré par beaucoup d’exemples et parsemé de nombreux tableaux récapitulatifs, reste accessible pour les non spécialistes. — P.-M. Jerumanis