Cette réédition est heureuse : elle nous redit la passion du P. Matthieu Dauchez, prêtre français entièrement consacré à une œuvre de présence et d’éducation pour les enfants de la rue à Manille (Fondation « Tulay Ng Kabataan »). Elle nous montre comment s’approfondissent aussi spirituellement cette mission et l’apport décisif de son regard sur ceux et celles qu’il rencontre dans les rues de pauvreté. Le livre et les témoignages nous centrent sur l’essentiel : ces enfants sont des mendiants d’amour et ils nous mettent ainsi à leur école. Dans leur manière de vivre, leurs réactions, leurs forces, ils attestent que le dialogue n’est jamais unilatéral et que toute vie spirituelle vraie apprend du partage de vies concrètes. « Le vrai défi n’est pas de partir (vers eux) mais de demeurer fidèle au quotidien ».

Le livre est bien composé : une réflexion est proposée au début de chaque chapitre et des témoignages attestent la justesse de ce qui est partagé. Ces thématiques forment comme un bouquet de fleurs douloureuses et joyeuses qui « définissent » a posteriori ce qu’est l’amour. Les références explicites à la Parole de Dieu éclairent la lecture. Tour à tour, nous sommes conviés à écouter des « cœurs qui battent » au-delà de la trahison. Nous découvrons ce qu’est construire « une cathédrale », recevoir « les consolations du Bon Dieu », comprendre « la symphonie des petits actes » et « le trésor de l’enfance », participer au mystère des larmes qui est « le sang de l’âme » (p. 72). Où donc observer la grâce agissante sinon dans l’ordinaire des vies en ayant « les pieds sur terre et les cœurs au ciel » ?

Ces lignes ne mènent pas au désespoir, mais à la joie. Elles nous montrent comment la foi et les œuvres sont en communion pour qui s’abandonne au Seigneur de l’univers. Rien n’échappe à la puissance et à la présence du Seigneur si nous restons fidèles à l’appel qu’il nous fait d’être avec Lui et de Le voir en action. — A. M.