Reprendre à nouveaux frais l'inventaire des ministères selon le
Nouveau Testament, en 150 pages, tient déjà de la gageure.
Réfléchir ensuite à ce qu'implique ce service d'une parole
apostolique et prophétique en 80 pages de plus, pour aboutir à
quelques questions «devenues plus vives aujourd'hui», c'est oser
davantage encore. Les quelques 30 pages d'introduction disent la
valeur d'une telle lecture, que la conclusion signe en 10 pages.
Situé «en-deçà de la plupart des problèmes d'actualité», l'effort
vise «le ministère sacerdotal saisi à sa racine, dans le cadre des
premiers ministères chrétiens dont les écrits néotestamentaires
portent le reflet» (11). Ainsi le motif de la parole vient-il
renouveler la dimension médiatrice du ministère «jusque dans
l'intime de ces 'paroles gestuées' aujourd'hui nommées sacrements»
(12). Un virage qui atteint, selon l'auteur, la pointe du ministère
chrétien, à partir d'un dossier biblique totalement reconsidéré. La
lecture diachronique du Nouveau Testament (première partie)
commence par le témoignage de Paul, avant d'en arriver aux autres
milieux judéo-chrétiens, puis de traiter les Églises des Actes et
des Pastorales, jusqu'au terme du premier siècle (les écrits
évangéliques y compris). De cet immense parcours qu'il ne peut être
question de discuter ici, on retiendra l'innovation sémantique du
mot apostolos (61), l'identification des épiscopes aux serveurs de
la parole (69), la pseudépigraphie (même évangélique) qu'apportent
ces prophètes qui re-présentent la parole première (77), la
diversité des situations communautaires selon les milieux
judéo-chrétiens et helléno-chrétiens (109), le détachement du
service de la parole à partir du service de la table communautaire,
«car les tables s'attachent à des lieux précis alors que la parole
apostolique les surplombe» (176).
La deuxième partie synthétise cet inventaire, en précisant le
vocabulaire ministériel des communautés chrétiennes en contexte
hellénistique, loin du langage cultuel ou sacrificiel ultérieur
(ch.6). C'est la parole des prophètes chrétiens (ch.7), c'est la
diaconie touchant «le pain, la parole et l'entraide» (ch.8) qui
vont, à travers de continuels déplacements sémantiques, à partir
d'horizons communautaires toujours différents, s'agglutiner pour en
arriver, dès les Pastorales et la première période patristique, à
un ministère à deux, puis à trois degrés (254). Bref, «l'histoire
des ministères est celle d'un continuel enchevêtrement… ainsi
l'Église a-t-elle su adapter les rôles de chacun, tout en gardant
les mêmes titres, du moins après le passage essentiel qui va des
premiers apôtres, prophètes et docteurs aux épiscopes, aux
presbytres et aux diacres» (257). Ce dossier percutant, traité avec
l'audace que l'on devine, aboutit à des propositions courageuses
(dans la ligne de Vatican II plus que de Trente), notamment en ce
qui regarde les diacres actuels: «leur tâche d'aujourd'hui est
celle d'une libre découverte des secteurs nouveaux où devrait
s'exercer la ministérialité de l'Église» (260-261). Même si elle
doit être mise en perspective, une telle étude est incontournable,
pour dire le ministère «après Jésus». - N. Hausman, S.C.M.