Dans ce remarquable parcours d'Écriture dans la Tradition, Ph.
Henne, dominicain, prof. à la Faculté de théologie (Lille),
présente, avec grande clarté, n'hésitant pas à les citer, une
trentaine de Pères de l'Église, regroupés en sept périodes
distinctes par leur relation à la Bible: les premiers commentaires
(jusqu'en 150); les apologistes (Justin, Irénée, Tertullien,
Hippolyte); l'école d'Alexandrie (Clément, Origène; Athanase,
Didyme et Cyrille); les Pères des petites contrées voisines à
l'Égypte (Eusèbes, Éphrem, Basile, les deux Grégoire, de Nysse et
de Naziance), l'école d'Antioche (Diodore, Chrysostome, Théodore,
Théodoret), les grandes synthèses latines avec Hilaire, Ambroise,
Jérôme, Augustin, Pierre Chrysologue.L'A. met bien en évidence le
contexte ecclésial et intellectuel, qui permet de comprendre la
manière dont les Pères abordent les Écritures comme argument
polémique ou instrument de défense de la doctrine de l'Église, ou
bien pour elles-mêmes, comme source de méditation, ou encore comme
document historique. Il montre aussi, témoignant d'une grande
érudition et maîtrise du sujet, comment ces derniers s'influencent
entre eux. Deux grandes figures émergent. La première est celle de
l'exégète alexandrin Origène qui, après les apologistes utilisant
les Écritures comme armes défensives, leur accorde un statut
d'autonomie, les appréciant pour elles-mêmes. L'école d'Antioche
finira par rejeter cette lecture allégorique des Écritures,
préférant revenir à une lecture simple, littérale et historique du
texte. Le zèle apostolique de Chrysostome lui permet d'échapper à
cette fatale erreur. La deuxième figure, empruntée au monde latin,
est celle d'Augustin dont «le génie est d'avoir pu exprimer son
expérience personnelle en des termes qui rejoignent l'humanité
universelle et d'avoir plongé toute cette réflexion dans une
méditation toute tournée vers Dieu» (p. 215).Enfin, la tradition
monastique, avec comme figures de proue Grégoire le Grand, Bède le
Vénérable et Bernard de Clervaux, redonnera souffle à cet héritage
des Pères, en déployant le sens mystique des Écritures. Cette
synthèse sera fort appréciée par les familiers des Pères de
l'Église. Elle donnera aussi le goût d'aborder le trésor des
Écritures en recourant à la tradition des Pères. - St. Dandé fmj