L'évangile de Mc a déjà fait l'objet de nombreuses études
narratives qui ont porté, elles aussi, sur la construction du
personnage des disciples et l'implication du lecteur. Celle-ci,
fruit d'une thèse doctorale, a toute sa place dans la collection
«Le livre et le rouleau», à la suite des ouvrages de G. Van Oyen,
J. Resseguie ou E. Struthers Malbon, tant elle est une contribution
importante et originale. Après la première partie introductive qui
reprend le début de l'évangile (Mc 1-8), l'A. lit de près la
«section du chemin» (8,27-10,52) et montre comment Jésus lui-même y
caractérise ses disciples (cf. le titre: le disciple selon Jésus)
tout en imbriquant ces instructions sur les disciples et la triple
prédiction de sa Passion. Cette section est entourée par la
guérison de deux aveugles. La première, à Bethsaïde, se fait en
deux temps. Elle annonce que la confession du Christ par Pierre
(8,29) ne sera que la première étape d'un chemin de guérison qui
conduira, au-delà de la Résurrection, à une «suivance» sans
condition. Le passage de la foule à l'état de disciple repose sur
un choix libre, laissé à chacun. L'enjeu n'est pas seulement de
croire mais de suivre et c'est dans la sequela que se
comprendra la nécessité (cf. 8,31) de la Passion avant la vie
glorieuse. À l'autre bout du chemin, Bartimée montre que l'idéal du
disciple n'est pas inatteignable. Surmontant l'obstacle de la foule
qui le rabroue, et débarrassé de son manteau, signe de ces
richesses qui encombrent (cf. 10,22), il vient vers Jésus, non
seulement pour le supplier de le guérir mais, plus encore, pour se
mettre à sa suite, en chemin.
Relevons quelques apports significatifs. L'A. souligne que c'est
Jésus, et non pas tant le narrateur, qui construit la figure du
disciple que Bartimée vient accomplir. Il prend position sur la
question de l'incompréhension des disciples, en montrant avec
conviction qu'il ne s'agit pas d'une faillite totale mais qu'elle
est au contraire assumée dans la Passion et reçoit un terme au
moment de la Résurrection. Bien plus, il y a en Mc une nécessité du
disciple en lien avec celle de la proclamation de l'évangile. En
outre, la finesse de lecture, attentive à distinguer les prolepses
internes au récit qui concernent Jésus et celles, externes,
relatives aux disciples, permet d'articuler le lecteur sur la
figure des disciples. - S. Dehorter