Voici les actes du colloque qui a présidé à l’ouverture d’une nouvelle chaire Jean Rodhain à la faculté de théologie de Strasbourg. L’ensemble est coordonné par Frédéric Trautmann, premier titulaire de la chaire. On y trouve des regards assez divers sur la notion de charité : des matrices à l’œuvre dans la théologie de la charité comme celle de Jean Rodhain (J.-Ch. Descubes), des aspects juridiques (A.-L. Laumondais, G. Bourdier, A. Bamberg) et ecclésiologiques (M. Deneken), plusieurs exemples d’initiatives dont il est rendu compte ainsi qu’une exposition photographique (C. de Carné). Retenons en particulier quatre contributions.
L. Blanchon déploie la perspective d’une théologie à l’écoute des plus pauvres, dans la ligne de Joseph Wresinski. Elle rend compte de sa propre recherche ainsi que du travail d’une équipe du Centre Sèvres, relevant comment de grandes questions théologiques sont retravaillées de manière très prometteuse lorsque la parole des plus pauvres est prise au sérieux.
D. Fricker analyse le rapprochement des deux commandements de l’amour, dans une gezera shawa qui semble propre à Jésus. Mc renvoie au règne de Dieu dont l’amour rend seulement proche – il faut encore partager ses biens avec les pauvres, Lc fait entendre la parabole du bon samaritain qui met en situation éthique et relativise l’identité religieuse et la priorité accordée au culte, Mt montre comment toute la loi est résumée dans ce double commandement tel que la pratique de Jésus l’interprète.
Avec la figure de Basile de Césarée, M. Cutino analyse le tournant dans l’assistance envers les pauvres au ive siècle. Il y discerne une véritable « révolution culturelle » car les pauvres deviennent visibles et « pierre de touche pour mesurer l’humanité de toute la société ».
T. Cooreman-Guittin s’interroge sur la manière dont la charité peut être « capacitante » et non humiliante. La réciprocité que devrait comprendre la charité s’exprime dans la coexistence en chacun de la figure du Christ receveur et du Christ donateur, du Christ soignant et du Christ soigné. Elle souligne comment la notion d’amitié sociale déployée dans Fratelli Tutti rend compte d’une fraternité capacitante à dimension politique. — F. Odinet