Prêtres en Gaule mérovingienne

R. Godding
Storia - reviewer : Bernard Joassart s.j.
Cet ouvrage comble à coup sûr une lacune dans notre connaissance du sacerdoce. Certes pas du point de vue de la théologie, où les études abondent, mais bien quant à son histoire, au vécu concret, et tout particulièrement en ce qui concerne le «prêtre» entendu au sens de «presbyter», distinct de l'évêque, de qui il n'est que l'auxiliaire (et qu'il soit bien clair que le monde monastique n'est pas ici envisagé). L'enquête, qui couvre la période allant de la fin du 5e siècle au début du 8e, et s'étend au royaume de Clovis et de ses successeurs, exigeait une minutie extrême, à travers une documentation qui ne manque pas de présenter des embûches, que ce soit les sources littéraires - en particulier les vies de saints (l'A., bollandiste de métier, en examina 80) - ou les sources juridiques, tant canoniques que civiles, qui bien souvent sont un reflet déformé de la réalité, ou encore les sources diplomatiques - peu utiles in casu - et épigraphiques. Le résultat de ces investigations au milieu d'une forêt très dense, est impressionnant. L'A. a essentiellement suivi le prêtre tout au long de sa vie. Depuis sa naissance jusqu'à sa mort et son ensevelissement, en passant par son entrée dans la cléricature, le temps de sa formation, l'examen des conditions requises pour recevoir l'ordination, ce qui empêche celle-ci et comment elle lui est conférée, sa condition face au mariage, ses conditions de vie, qui ne sont pas exactement les mêmes en milieu urbain ou en milieu rural, sa position face à son évêque, à ses juges s'il commet quelque délit, et bien évidemment ce qui fait le quotidien de son activité pastorale. Tout au long de cette enquête on voit apparaître des conclusions qui ne manquent pas d'être intéressantes. Avant tout, l'époque connaît deux types de clergés: l'un célibataire, bien formé, le plus souvent établi en milieu urbain, occupe une place essentielle dans la vie du diocèse; l'autre composé d'hommes mariés avant l'ordination, et à qui on demande la continence pour raison de pureté rituelle, dont la formation a été plus succincte, mais qui manifestement jouissent d'une réelle autorité morale, et que l'on rencontre principalement dans des régions rurales. La raison de l'existence d'un tel clergé? Le nombre des communautés chrétiennes augmentent et le soin des âmes exige une présence que ne peuvent assurer les autres clercs. Autrement dit, si le sacerdoce est affaire de vocation, il est aussi affaire des communautés à qui doivent être distribués les secours divins. Évidemment on ne peut manquer de se demander si notre époque, cruellement indigente de prêtres, ne pourrait tirer des enseignements d'une telle pratique, étant bien entendu qu'une telle question dépasse le travail de l'historien et que les conditions actuelles sont loin de reproduire celles d'antan. Autre conclusion particulièrement significative: l'autonomie croissante, ou peut-être plus exactement, l'élargissement des tâches dévolues au prêtre par rapport à son évêque, qui n'est plus le seul pasteur, du moins dans certaines fonctions (p. ex. certaines formes de réconciliation des pécheurs).
L'intérêt de ce livre ne s'arrête toutefois pas au texte proprement dit. Les annexes méritent qu'on s'y attarde. Tout d'abord une dizaine de tableaux relatifs à des situations précises (p. ex. le 5e à propos de la terminologie du sacerdoce dans les textes hagiographiques) (N. B. la légende de chacun d'eux se trouve énoncée dans le corps du texte là où sont présentées ces situations); ensuite une prosopographie des prêtres de l'époque et de l'aire retenues; enfin un index unique, onomastique et thématique. - B. Joassart, S.J.

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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