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Based in Jerusalem, The Elijah Interfaith Institute, founded and presided by Rabbi Alon Goshen-Gottstein, organizes meetings of religious leaders in a spirit of dialogue and collaboration. The chosen themes include points of doctrine and burning questions for inter-religious relations. These meetings rely on the working papers of specialists of six traditions (Judaism, Christianity, Islam, Buddhism, Hinduism and Sikhism). Updated, these essays are now edited in a new collection. (…)

A. Goshen-Gottstein (éd.), The Religious other. Hostility, hospitality, and the hope of human flourishing, coll. Interreligious Reflections, Lanham, Lexington Books, 2014, 16x23, 188 p., rel., $88. ISBN 978-0-7391-9256-6 ; The Crisis of the Holy. Challenges and transformations in world religions, 2014, 168 p., $88. ISBN 978-1-4985-0343-3 ; Sharing Wisdom. Benefits and Boundaries of Interreligious Learning, 2017, 118 p., $75. ISBN 978-1-4985-4557-0 ; The Future of Religious Leadership. World Religions in Conversation, 2016, 208 p., $85. ISBN 978-1-4985-4024-7 ; Friendship across religions. Theological perspectives on interreligious friendship, 2015, 182 p., $89. ISBN 978-1-4985-2635-7 ; Memory and hope. Forgiveness, healing, and interfaith relations, 2015, 166 p., $84. ISBN 978-1-4985-2639-5

Basé à Jérusalem, le Elijah Interfaith Institute, fondé et présidé par le rabbin Alon Goshen-Gottstein, organise notamment des rencontres de responsables religieux dans un esprit de dialogue et de collaboration. Les thèmes retenus comportent des enjeux de doctrine et des questions brûlantes pour les relations interreligieuses. Ces rencontres s’appuient sur les travaux de spécialistes de six traditions (judaïsme, christianisme, islam, bouddhisme, hindouisme et sikhisme1). Mis à jour, ces travaux sont à présent repris dans une nouvelle collection. Nous les présentons dans l’ordre chronologique des rencontres et non de leur publication. Il ne saurait être question de résumer cet ensemble. Nous mettons en relief des apports originaux ou moins connus. La lecture de ces volumes se révèle féconde à trois niveaux : une découverte approfondie des ressources de chaque tradition ; une meilleure connaissance de soi à la lumière des « autres » ; l’amorce d’une réflexion et d’une action concertées en vue d’une pleine « floraison » de notre commune humanité.

Rencontrer l’Autre : hostilité, hospitalité, espérance (Séville, 2003)

Comment chaque religion voit-elle l’« autre » dans sa différence culturelle et surtout religieuse ? Comment a-t-elle vécu la tension hostilité/hospitalité ? Quel message et quelles ressources propose-t-elle à la communauté humaine ?

Si la Bible fait l’éloge de l’hospitalité à l’égard de l’étranger, ce thème n’a pas trouvé beaucoup d’écho dans la tradition juive. La situation de minorité, souvent méprisée voire persécutée, a entraîné un réflexe de défense et de survie. On peut en outre repérer une tension entre la perspective universelle de la création et celle, particulière, de l’élection et de l’alliance.

Le Nouveau Testament proclame le salut universel dans le Christ. Il n’y a plus ni païen ni juif. Mais si cela s’applique aux seuls baptisés, venus tant des nations païennes que du peuple juif, de nouveaux clivages réapparaissent, entraînant le risque d’hostilités dont l’histoire chrétienne abonde.

La section sur l’islam déplore qu’à l’époque contemporaine celui-ci se soit largement dégradé en idéologie et en programme volontariste de remodelage uniforme de la société. Ce programme trahit une déperdition de diversité dans l’interprétation des sources, la pensée et la spiritualité. La définition minutieuse du permis et du défendu accentue les particularités et les clivages entre communautés de foi.

L’hindouisme fait entendre deux voix. La première s’inspire d’une interprétation radicale de la non-dualité. Si l’on reconnaît l’existence du seul Absolu, si les diversités empiriques (économiques, sociales, culturelles, politiques, religieuses) n’ont qu’une consistance illusoire, la question même de l’altérité ne se pose pas. En l’absence de tout « autre », tant l’hostilité que l’hospitalité s’évaporent et la conversion d’une religion à une autre n’a pas de sens. La seconde voix apporte un rééquilibrage. Théiste et réaliste, elle marque la distinction entre la Divinité et le monde. Reconnaissant l’altérité, elle prend en compte les phénomènes d’opposition et de violence mais propose aussi le débat comme une voie pour les surmonter.

En perspective bouddhique, hostilité et violence sont générées par la perception erronée d’un sujet égocentré qui se pose en rival. Les discriminations sont le produit artificiel de cette méprise fondamentale. Un comportement éthique et surtout une pratique méditative permettent de détruire les germes d’hostilité et de développer une bienveillance universelle et une compassion active. Dans le concret de l’histoire, cependant, l’ouverture à l’universel peut cohabiter avec des rivalités d’écoles.

De ce premier tour d’horizon, il apparaît que les diverses contributions accordent un poids variable à l’exposé doctrinal et à l’enquête historique. Dans les trois religions « abrahamiques », le rapport à l’autre et la tension hostilité/hospitalité se définissent à partir de la relation entre la créature et le Dieu unique, entre sa parole créatrice et sa parole de révélation, parole qui commande aussi l’hospitalité à l’égard de l’étranger. Bouddhisme et hindouisme proposent des méthodes de gestion ou de dépassement des tensions entre hostilité et hospitalité, de même qu’entre identité (personnelle et collective) et ouverture. Les croyants disposent ainsi d’une panoplie de ressources en vue d’entamer, par le dialogue et l’échange, un parcours commun.

Le sacré en crise(s) : mutations des religions (Taiwan, 2005)

Ce volume est surtout descriptif et analytique. Cinq études tentent de repérer les facteurs responsables, dans telle religion, de l’actuelle « crise du sacré ». Plusieurs diagnostiquent une profonde crise d’identité.

La section sur le judaïsme souligne la montée de l’individualisme et la fragmentation de la communauté en tendances qui peinent à communiquer entre elles, notamment en Israël.

Dans le monde hindou, un besoin de réformes se fait sentir depuis le xixe siècle mais se heurte à l’absence de leadership et plus profondément à la difficulté de définir une identité commune qui fédérerait l’extrême diversité des traditions ; cette crise frappe frontalement les hindous toujours plus nombreux qui, dans la diaspora, sont privés du cadre traditionnel.

Si le bouddhisme connaît des transformations profondes, notamment des rôles du moine et du laïc, ses enseignements sur l’impermanence de tous les phénomènes le préparent dans une certaine mesure à amortir le choc du changement ; en outre, le renouveau de la méditation explique pour une part l’intérêt qu’il rencontre en Occident.

Dans le cas de l’islam, il s’agirait moins d’une crise d’identité que d’une « crise épistémologique » : la tradition de réflexion ne parvient plus à progresser selon ses propres normes. L’islam contemporain, tenté de se définir par son refus de l’Occident et de la modernité (une position de refus qu’un certain fondamentalisme séculariste lui rend bien…), se rabattrait sur l’organisation minutieuse et rassurante de la vie sociale selon des modèles présentés comme un retour à la tradition.

Quant aux crises que connaît le domaine chrétien, elles sont suffisamment familières au lecteur de la NRT pour ne pas justifier d’amples développements.

Dans de brèves pages de conclusion, A. Goshen-Gottstein propose de structurer ces données à l’aide de polarités en tension : identité (ou intégrité) et spiritualité, individu et collectivité. La manière dont chaque tradition tente de maintenir un équilibre entre ces pôles est instructive pour chacune des autres. Les crises sont aussi des occasions de renouveau et de créativité si nous savons tirer parti du miroir que nous tend chacune des autres religions pour retrouver l’audace de dépasser nos routines de pensée et de vie.

La Sagesse en partage (Amritsar, Inde, 2007)

Un partage de sagesse : ni simple communication de doctrines ni action commune dans la société mais une rencontre spirituelle concertée où chaque partenaire écoute et parle, offre et reçoit, accepte de se laisser transformer, en liberté et en réciprocité.

La Sagesse, aux yeux du chrétien, n’est autre que le Christ. Le chrétien est tenu par l’obligation du témoignage et de l’annonce, mais toujours dans une rencontre de gratuité où chacun donne et reçoit : par là, « nous honorons la puissance de la sagesse et l’intégrité de ceux qui peuvent l’accueillir ».

La sagesse hindoue est reconnaissance du Seigneur en toute chose et de toute chose en Lui. Elle est connaissance qui libère de l’aveuglement et de l’illusion. Notre perception de l’Absolu étant limitée, ce nous est un devoir d’apprendre les uns des autres. Le désir de partager s’arrête cependant à la volonté de convertir. La transmission de maître à disciple joue un rôle essentiel.

Le Livre saint des sikhs (« disciples ») est un lieu de partage entre traditions : il inclut de nombreuses paroles de saints tant hindous que musulmans. Ce Livre enseigne en outre que seul est à même de partager celui qui ne possède rien, dès lors que tout appartient à Dieu.

Parvenu à l’éveil, le Bouddha décida de partager la sagesse acquise avec ceux qui pourraient en tirer profit ; ou, plutôt, il laissa le mouvement de sa compassion lui inspirer les « moyens habiles » en vue de ce partage. Par ailleurs, le bouddhisme a souvent accepté de cohabiter avec les traditions religieuses des pays où il entrait et d’en recueillir des richesses, dans un esprit de complémentarité plus que de rivalité.

Selon le Coran, Dieu a envoyé un grand nombre de prophètes et n’a pas voulu imposer une communauté unique. Certes, la conviction inaliénable d’avoir reçu l’ultime Parole de Dieu a souvent généré en islam un sentiment d’autosuffisance ainsi qu’une fermeture encore accentuée par l’expérience coloniale. Les dons de Dieu doivent néanmoins être reçus avec humilité et avec la conscience de notre compréhension toujours partielle.

Dans la tradition juive, il ne manque pas de textes qui réduisent le partage de la sagesse à des connaissances profanes, ou à une communication unilatérale (la partie juive n’ayant rien à recevoir) ou encore comme une réalité des temps messianiques. D’aucuns envisagent une certaine réceptivité d’Israël à l’égard des nations, mais à la marge, en ce qui n’est pas essentiel. Nous retrouvons ainsi le thème de l’identité et de l’intégrité.

En conclusion, A. Goshen-Gottstein observe que les six traditions présentées se distribuent ici le long d’un axe universel/particulier, où bouddhisme et judaïsme occuperaient les deux positions extrêmes. Cela dit, aujourd’hui plus que jamais, aucune religion n’est indemne d’« altérations » induites par ses relations, souhaitées ou non, avec les autres. L’équilibre ne se laisse pas aisément définir et connaîtra des définitions différentes pour chaque tradition et peut-être pour chaque période de l’histoire. La quête toujours inachevée de cet équilibre est affaire de sagesse…

L’avenir des leaders religieux (Haifa, Israël, 2009)

Que des responsables ou des autorités de diverses religions parlent ensemble de leur vocation, de leur charge et des défis qu’ils rencontrent, voilà assurément un signe des temps. Repérons, cette fois encore, quelques traits caractéristiques.

Le leadership, en régime chrétien, se modèle sur le Christ. Il répond à un appel de Dieu et s’exerce comme ministère de service. Le défi est de combiner autorité et service, docilité à l’action de Dieu et attention à la vocation de la communauté entière.

Le beau modèle en islam est le prophète Mohammed, bien que ses fonctions religieuses et politiques se soient par la suite distribuées sur plusieurs figures d’autorité. L’histoire aide à distinguer trois types de fonctions : préserver et consolider la communauté et le patrimoine prophétique ; restaurer ou renouveler ; guider les croyants sur le chemin spirituel. Parmi les questions qui se posent avec acuité aujourd’hui : la participation des femmes, dans un modèle patriarcal fondé sur des traditions souvent plus culturelles que proprement religieuses ; le manque de formation des cadres ; la nécessité de tempérer la justice par le sens du pardon.

Dans le monde juif, on retrouve bien sûr le service de Dieu et de la communauté ainsi qu’une forte insistance sur la fonction d’étude et d’enseignement, y compris au plan juridique (halakha). Selon les périodes et les courants, la fonction du rabbin sera rapprochée davantage de la figure du roi, du prêtre ou du prophète. Depuis la fondation de l’État d’Israël, resurgit la question, peu pertinente pendant deux millénaires, du rapport entre autorités religieuses et politiques.

Dans le sikhisme, après la disparition du fondateur, Guru Nanak (1469-1539), et de ses neuf successeurs, c’est le Livre saint qui fait autorité, devenant en quelque sorte un guru perpétuel. Du xviiie siècle à nos jours cependant, la communauté a souffert d’interférences fâcheuses entre objectifs spirituels et enjeux politiques. Les cadres religieux bénéficient trop rarement d’une formation adaptée aux défis actuels, tant au Panjab que dans la nombreuse diaspora.

Très divers et peu structuré au plan de l’organisation, l’hindouisme n’a ni fondateur(s) ni, à proprement parler, prophètes. Tradition de sagesse mais aussi de rituels, il se transmet autour de figures d’enseignants ou de guides spirituels ainsi que de prêtres attachés aux temples ou invités à domicile. Dans l’ensemble, leur leadership s’exerce peu dans les questions de société et ne remet pas en cause la stratification des castes et le recrutement héréditaire. Tant en Inde que dans la diaspora, la formation en vue de transmettre le patrimoine religieux fait aujourd’hui cruellement défaut.

Dans le bouddhisme, en l’absence d’une Divinité, le leadership trouve dans le Bouddha un modèle et, dans certaines écoles du moins, plus qu’un modèle. La fonction de leader s’exerce selon un double mouvement de mise à distance (sagesse) et de retour (compassion). L’enseignement et la guidance (méditation, rituels), en particulier dans la relation maître/disciple, occupent une place centrale. Tandis que les laïcs assument aujourd’hui davantage de responsabilités, notamment en Extrême-Orient, moines et moniales cherchent de nouveaux modes de transmission du message et d’exercice de la compassion.

En dépit d’importantes différences doctrinales, une phénoménologie des pratiques de leadership met en lumière des convergences remarquables. Il en va de même, à notre époque de globalisation, pour les défis rencontrés, de sorte qu’une réflexion commune et des échanges d’expériences apparaissent possibles et souhaitables.

L’amitié dans les relations interreligieuses (Oxford, 2012)

Le terme « amitié » reçoit parfois des sens diffus. On l’entendra ici comme une relation « particulière, intime, et surtout spirituelle et transformante », une relation imprégnée d’affection et qui se construit dans la durée. Des amitiés vraiment spirituelles entre personnes de religions différentes sont-elles possibles et à quelles conditions ?

Dans la tradition juive, le thème de l’amitié semble peu présent (sauf peut-être l’entraide dans l’étude de la Torah) et celui de l’amitié interreligieuse se heurte au soupçon d’infidélité voire d’idolâtrie. Il est possible cependant et très souhaitable d’encourager des amitiés qui respectent un équilibre entre la continuité d’un patrimoine propre et l’ouverture à l’universel.

Reprenant une valeur du monde grec et romain, le christianisme a davantage célébré les vertus de l’amitié (on cite volontiers Aelred de Rievaulx) mais, à la suite notamment d’Augustin, s’est montré réservé à l’égard d’amitiés avec des non-chrétiens. De telles relations, si elles respectent la différence et les libertés, peuvent s’avérer précieuses pour connaître l’autre, se connaître soi, et développer l’art de la rencontre entre mondes spirituels : ne peut-on leur reconnaître une dimension de sacramentalité ?

Selon le Coran, c’est d’abord avec juifs et chrétiens que se pose la question de relations respectueuses susceptibles d’aider chaque partenaire à approfondir le don reçu de Dieu. Cet esprit d’émulation ne peut-il ensuite s’étendre aux relations avec d’autres croyants ? L’ouverture de principe n’efface évidemment pas de lourds contentieux historiques, en particulier avec les chrétiens et les juifs.

En perspective hindoue, c’est la connaissance vive de l’Absolu qui permet de dépasser toutes les polarités (y compris ami/ennemi) en direction d’une unité plus essentielle. Mais il faut aussi entendre l’éloge de l’amitié par le grand poète et dévot Tulsidas ou, plus près de nous, recueillir l’exemple du lien indéfectible entre Gandhi et le missionnaire anglican C.F. Andrews.

Dans le sikhisme, la foi au Dieu unique, parfois invoqué comme ami, l’égalité et la fraternité entre les humains, enfin la conviction que le service de Dieu et de l’humanité importe plus que les frontières de religion, tout cela encourage en principe les amitiés interreligieuses, bien qu’elles soient freinées par des clivages de castes ou par la mémoire de conflits entre communautés religieuses.

Le bouddhisme met en lumière le rôle de l’« ami de bien » (kalyâna-mitra) ou ami spirituel qui accompagne sur la voie et partage sagesse et compassion. Vécue traditionnellement au sein de la communauté (monastique ou laïque), cette relation peut s’étendre à des non-bouddhistes, ainsi que le montrent des exemples contemporains, entre autres celui du Dalaï-lama.

Partant de cette diversité, A. Goshen-Gottstein propose une modélisation qui, distinguant cinq facettes de l’amitié interreligieuse, aide à répondre aux objections, à réduire les résistances et à formuler des recommandations prudentes et réalistes. Il est révélateur que, d’une manière ou d’une autre, tous les intervenants aient témoigné que c’est l’expérience personnelle d’amitiés interreligieuses qui les a amenés à pousser la réflexion bien plus loin que les coutumes de leur communauté.

Mémoire, espérance, pardon, guérison (Sankt Ottilien, Munich, 2014)

Individuelle et collective, la mémoire est le lieu où nous accédons à la source de notre identité ; elle est aussi un fardeau, le poids de nos faiblesses et la trace des blessures que nos communautés se sont infligées à travers les siècles. Ces histoires et le regard porté sur elles diffèrent singulièrement d’une religion à l’autre.

La mémoire – et plus encore la mémoire collective – est malléable : elle est un processus de remémoration (en même temps que d’oubli) et de réinterprétation, l’art de préserver le passé sans écraser le présent ni obturer l’avenir. Dans le judaïsme, la Bible et la liturgie des fêtes font une large place à ce travail de mémoire et d’identité. Deux exemples majeurs illustrent ce défi : les relations avec le peuple allemand ainsi qu’avec le monde palestinien et arabe.

Ayant été longuement associé à des pouvoirs conquérants, le christianisme doit se montrer attentif aux jeux de pouvoirs dans son histoire et à la répression de la mémoire des faibles ou des marginaux. Évitant toute association trop rapide entre souffrance et péché, les chrétiens ne devraient-ils pas traduire leur espérance dans des rituels qui guérissent les traumatismes de la mémoire ?

La tradition hindoue, elle, se réfère peu à des événements historiques mais invite à faire mémoire des liens aux ancêtres, aux dieux, aux êtres qui nous entourent. C’est aussi la conscience vigilante – non l’oubli ou l’ignorance – qui doit présider à notre relation à l’Absolu. Les passions et le poids de nos actions passées faussent nos relations : à titre d’exemple, le malentendu entre hindous et chrétiens à propos des conversions exige un travail commun de purification de nos mémoires.

Quant aux sikhs, ils cultivent tant la mémoire identitaire des événements qui ont affecté la communauté (violences, persécutions) que la souvenance active de la présence de Dieu, la remémoration du Nom. La conviction que Dieu se souvient de nous est source de confiance et d’espérance.

La contribution islamique part de débats récents à propos de deux situations conflictuelles : le statut du site du Temple à Jérusalem et les relations sunnites/shî’ites. Par l’étude des sources et le débat, il est possible de corriger les distorsions de la mémoire dues au passage du temps et aux jeux de pouvoirs. Ce travail de vérité doit s’appuyer sur la conversion des cœurs et la pratique de la souvenance de Dieu.

Le bouddhisme souligne fermement le caractère fluctuant de la mémoire et la fragilité des identités qu’elle construit. Dans les diverses pratiques spirituelles, il s’agit moins de se rappeler le passé que de se remémorer ce que nous sommes, d’en devenir pleinement conscients : l’ouverture du présent est principe de libération et source de confiance.

* * *

Ces notations sommaires ne remplacent évidemment pas les analyses fouillées des six volumes. Chacun des quelque 40 essais reflète les recherches et les convictions d’un scholar et non la position de telle religion. Cette inévitable limitation est aussi une force car nous voyons des croyants s’interroger et s’engager personnellement. Sous la houlette du rabbin Goshen-Gottstein, ils pratiquent ensemble l’intelligence et la bienveillance, l’ambition critique et la modestie. Souhaitons que se poursuivent ce travail de recherche ainsi que l’élaboration d’instruments pédagogiques au service d’un large public (<www.elijah-interfaith.org>).

Notes de bas de page

  • 1 Les principaux collaborateurs sont, pour le judaïsme : Alon Goshen-Gottstein, Barry Levy, Meir Sendor ; pour le christianisme : Awet Iassu Andemicael, Sidney Griffith, Flora Keshgegian, Ryan McAnnally-Linz, Stephen Sykes, Johann Vento, Miroslav Volf ; pour l’islam : Vincent Cornell, Timothy Gianotti, Muhammad Suheyl Umar ; pour le bouddhisme : Michael von Brück, Ruben Habito, Maria Reis Habito, Richard Hayes, Sallie King ; pour l’hindouisme : Anantanand Rambachan, Deepak Sarma, Ashok Vohra ; pour le sikhisme : Pal Ahluwalia, Balwant Singh Dhillon, Rahuldeep Gill, Eleanor Nesbitt.

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