Cette étude de la manière dont l'hymnologie de l'Église des
premiers siècles reflète l'adhésion des communautés au Mystère du
Christ se présente comme une vérification d'un principe
herméneutique ainsi défini par l'A., un jésuite qui enseigne la
théologie au Canisius College, Buffalo, N.Y.: «L'autorité
interprétative (du contenu de la foi) ne réside pas seulement dans
les Écritures, ni dans les définitions dogmatiques, ni dans une
autorité attachée à une fonction (le pape). Cette autorité réside
dans l'ensemble de ces instances, mais dans la mesure où elle se
trouve validée au sein de l'expérience consciente, culturellement
située, de la communauté des croyants. C'est dans ce cas seulement
que la tradition doctrinale de l'Église peut affirmer qu'elle
relève authentiquement de la Révélation divine». Ce principe peut
se réclamer, selon l'A., de l'enseignement du Ier Concile du
Vatican, qui (toujours selon lui) s'est inspiré du célèbre article
de John Henry Newman, publié en 1859 dans The Rambler, «On
consulting the Faithful in Matters of Doctrine», en précisant que
«la Révélation divine est contenue dans les Écritures et des
traditions non écrites», lesquelles, explicite l'A., sont «reçues
consciemment par la communauté des croyants». L'A. invoque en ce
sens ce principe de l'Indiculus anti-pélagien, erronément attribué
au pape Célestin Ier: «La règle de la prière est la règle de la
foi», et qui est cité, entre autres textes magistériels, dans
l'encyclique de Pie XII, Divino afflante Spiritu. Dans ce contexte,
ce principe est invoqué à l'encontre d'interprétations fantaisistes
(qualifiées de «mystiques» ou de «spirituelles») de l'Écriture, et
renvoie au sens, considéré comme authentique, que revêt l'usage
liturgique des textes bibliques.
L'A. élargit cette interprétation, et l'applique à l'action de
l'Esprit qui, écrit-il,« est à l'oeuvre dans la communauté des
croyants» (p. 25). Il en voit une illustration dans la démarche des
Pères du Concile de Chalcédoine (451). En recourant à la règle de
la foi, il furent amenés à confronter leur lecture de l'Écriture à
l'expérience contemporaine de la communauté des croyants, et à
«harmoniser la vie morale de la communauté croyante avec le
contexte plus large des expériences de la culture du Ve siècle». De
même, la Règle de la foi requiert que l'Église en Amérique au seuil
du 3e millénaire formule le dogme d'une manière qui reflète le
contexte américain de ce siècle, celui d'une expérience de foi
occidentale et pragmatique» (p. 28). Il cite, comme exemple, la
question de l'infaillibilité pontificale, qui fait question chez
les croyants de cette Église depuis l'encyclique Humanae vitae
(1968). Cette extension à des interrogations contemporaines de
l'antique maxime de l'Indiculus, et celle, peut-être plus
pertinente, de la suggestion newmanienne, susciteront peut-être des
discussions. Mais ceci ne saurait affecter l'intérêt que présente
l'analyse par l'A. de la diversité des hymnes des premiers siècles
en ce qui concerne la personne et les deux natures du Christ. Il
serait éclairant qu'on la prenne en compte dans l'enseignement de
la christologie. - P. Lebeau, S.J.