Si le « religieux » peut se penser anthropologiquement
comme ce qui (récits, rituels, cultes…) représente
le chemin que l'homme cherche à parcourir,
parfois dangereusement, vers cette réalité transcendante (que
beaucoup de cultures nomment « Dieu » ou même
« dieux »), on se trouvera en situation de tension
lorsque l'expérience de cette région humaine du religieux aura à se
laisser questionner par ce qui se présente comme Révélation,
comme chemin de Dieu vers l'homme. Là se dit et agit
Celui qui se donne à connaître ainsi à ses risques et périls. Ce
croisement sera le lieu d'un conflit où s'éprouve donc « un
risque ». L'emprise du religieux va être contestée et même
accusée d'idolâtrie (comme dans le prophétisme au cours de
l'histoire religieuse d'Israël), si ce n'est même réprouvé comme ce
qui doit être détruit. Détruit ou converti ! La foi en
l'action du Christ au sein même de la tradition juive inaugure une
religion qui n'est pas seulement « une religion de la sortie
de la religion » (Gauchet) mais qui se reconnaît comme sa
vérité. La religion est menacée par cet Évangile qui déchire le
voile du Temple. Dieu est menacé par ces dérives religieuses
perverses. Cette tension s'exacerbe aujourd'hui dans un contexte de
sécularisation qui voit s'autonomiser tous les registres de nos
sociétés, occidentales tout au moins. Il faudra donc convoquer une
approche pluridisciplinaire de ce risque encouru conjointement par
les deux pôles de cette configuration. Effervescence du
« religieux » versus « mort de Dieu ». La
réflexion devra se porter, au gré des disciplines, sur les champs
de la philosophie, de la théologie, de l'art (qui se pose comme
religion !), de l'analyse sociale de l'ultra-modernité où la
mort des « grands récits » se voit relayée par les
utopies quasi-religieuses de l'homme expansé ! La marginalité
« mystique » (reconnue ou sauvage), ou encore
l'expression irrévérencieuse de la littérature contemporaine, quand
ce n'est pas l'émergence des spiritualités sans Dieu, manifestent à
leur tour ce qui se profile comme « le risque de la religion
ou le pari de la liberté ». En chrétienté, on retrouve la
liberté de l'appel évangélique de Celui qui nous sollicite à sa
suite et la liberté de la réponse de l'humain convoqué à cette
union sans confusion d'un engagement où l'homme
« religieux » se risque à l'aventure déjà risquée par
Dieu lui-même. Un livre de réflexion exigeante et une radiographie
précise de notre époque encore inédite et incertaine. L'Histoire du
Salut y chemine avec patience. - J. Burton s.j.