Ce livre est une petite merveille : il nous invite non pas à voyager, mais à marcher vers un lieu spirituel. Personne ne niera la compétence et l’expérience de Gaëlle de La Brosse qui travaille depuis plus de trente ans sur les chemins de pèlerinage et a déjà publié plus de 10 ouvrages sur ces thèmes. Ce qui est écrit dans cet éloge ouvre le cœur et l’esprit et permettra à certains de se mettre en marche ou bien à d’autres de s’imaginer sur la route de Saint-Jacques ou celle de Rocamadour. Parfois « on part randonneur et on arrive pèlerin ».

La première partie rend compte du mystère qui réside dans toute marche. « Quel est cet appel impérieux qui pousse les pèlerins à quitter leur quotidien confortable pour se lancer vers l’inconnu ? Et quelle est la particularité de ces hauts lieux qui les aimantent ? » Pour comprendre ce phénomène universel, quelques clés anthropologiques et quelques symboles nous sont offerts : l’appel à partir, la rupture, le prélude du chemin. La considération du sanctuaire entre ciel et terre : découvrir l’esprit des lieux dans l’espace et le temps, s’attarder sur le récit des sanctuaires et ce qui nous attire, faire mémoire d’un message universel qui, à travers le temps, unit mystérieusement le ciel et la terre où marche le pèlerin. La marche est le lieu des rencontres ou de la rencontre qui change une vie : le cœur s’y prépare, le lien entre l’esprit et la chair s’établit car rien de plus concret et de plus simple que de dialoguer sur une route. Nous sommes en vérité au milieu d’une religion pour tous : celle d’un peuple. Car marcher oblige à une alternance entre parole et silence. Marcher, c’est réaliser un chemin initiatique, celui qui ouvre à une compréhension vivante du sacré et des sacrements. Et la joie est au rendez-vous sur le chemin ou dans le sanctuaire que l’on a choisi de rejoindre : joie, fierté, soulagement. L’homme a marché et il reste debout ! Quand il revient chez lui, il est autre : sa mémoire et son désir de partager font des merveilles en lui et autour de lui.

La deuxième partie est plus existentielle : l’A. nous y fait part de sa propre expérience et des chemins divers parcourus depuis des années. Ce n’est pas un guide des lieux, même si l’on peut reconnaître la précision et la justesse de certaines observations. C’est un livre de vie dans lequel le récit est en vérité le partage discret d’une vie spirituelle personnelle qui a reçu beaucoup dans tel ou tel lieu. Car la variété des chemins est déjà un livre ouvert pour tous : en France, au Portugal, en Italie, en Espagne, en Pologne, en Bretagne. Les grands sanctuaires révèlent leur grâce propre et leur univers qui imprègne celui ou celle qui y passe. Le trésor de ces récits est de nous faire découvrir l’Esprit qui se symbolise par la terre visitée. C’est une manière de vivre la surprise de l’Incarnation divine. Le style littéraire est plein de finesse et il est tellement bien tracé qu’il nous mène à une spiritualité de la route qui est une vérité du christianisme en tout temps et en tout lieu. De la marche avec des « bannières » aux temps personnels de partage, tout pèlerin fait son chemin. À chacun de se préparer pour une route : si le pèlerinage a partie liée avec le renoncement ou la mort, « c’est qu’il est une étape nécessaire vers la renaissance, vers un nouveau commencement » (p. 200). Cheminer, c’est répondre à une quête essentielle de l’homme et permettre une transformation intérieure à laquelle nous pouvons consentir. À chacun de préparer son départ et pour nous y aider, considérons la richesse de la bibliographie sur les pèlerinages et les sanctuaires qui est un trésor partagé par l’A. en fin de livre. — A.M.

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